Soleil froid et silence—fin de nuit—départ demain—herbe folle et vieux mur—premier bruit de voiture—un merle décidé court sur un vieux toit—cherche sa nourriture—nuage couleur plomb— la neige est pour bientôt—le merle s’est perché sur un frigo rouillé dans le jardin en face.
lundi 27 mars 2023
samedi 25 mars 2023
à vif
à vif
le corps et la langue comme
des échardes — ce quelque chose qui transperce
et qui de l’intérieur de soi
peut déchirer l’intime de l’autre
alors desserrer l’imperceptible blessure entre les soi
comme entre les mots les césures créent le souffle
avoir besoin de rien qu’un abandon de blanc
pour protéger son amas de moi
des lancinantes ciselures cachées
klasma écrit en écho à ma traduction ( interlude 4 deuxième partie) des Vagues de Virginia Woolf:
Ils chantaient comme si le contour de leur être était aiguisé et aurait pu couper, fractionner la douceur de la lumière bleu-vert, l'humidité de la terre mouillée...
lundi 20 mars 2023
Interlude 4.2 p.93 Comme l'herbe ondulante
Comme l'herbe ondulante de la mer
les vapeurs
violettes
Comme les moiteurs
recroquevillées à l'arrière-plan
les dagues de glace
Comme la campagne
blanche de fleurs
les visqueuses fêlures
Comme les gobelets
zébrés de lumière éphémère
un glacis rouge
Comme les chants
enturbannées abrupts
à l'aplomb de la
flèche
Comme le grain du
bois les épluchures pitoyables
Comme l'étoile
polaire sa lumière blafarde
sa position immuable
Comme les ruisseaux
les torrents les étangs les lacs
le ciel tournoyant
les chevaux
virevoltants
Comme si au bord de
leur vie
Rien n'avait d'ombre
à partir de la phrase 2023 03 25 "They sprang as if the end of their being were sharpened and must cut, must split the softness of the blue green light, the dampness of the wet earth"Comme si leur fin était proche et que le bord de leur vie s'approchait "
Ma traduction
Ils
chantaient comme si leur chant était expulsé sous la pression du matin. Il
sautaient comme si leur fin était proche et que le bord de leur vie
s'approchait et devait fendre la douceur de la lumière bleu-vert, l'humidité
de la terre mouillée, les fumées et les vapeurs des volutes grasses de la
cuisine, ; les effluves chaudes de mouton et de bœuf ; l'abondance des
pâtisseries et des fruits ; les matières humides et les épluchures jetées
depuis le seau de la cuisine, et d'où s'échappait une lente vapeur montant du
tas d'ordures. Sur tout ce mouillé, ce tâché d'humidité, ce recroquevillé par
le trempage, ils descendaient, avides, impitoyables, abrupts, Ils plongeaient
soudain depuis les branches du lilas jusqu'à la grille, ils épiaient un escargot
et frappaient la coquille contre une pierre. Ils frappaient avec fureur,
méthodiquement, jusqu'à ce que la coquille se casse et que quelque chose de
visqueux suinte de la fêlure.
Ils
balayaient le ciel en tournoyant comme des flèches haut dans les airs lançant des notes brèves
et aiguës perchés sur les plus hautes branches d'un arbre ils regardaient à travers les feuilles les flèches des clochers et en bas la campagne blanchie par les fleurs,
avec l'herbe ondulante et la mer qui battait comme le tambour d'un régiment de
soldats enturbannées ou portant des casques à plumes.
Maintenant
et encore leurs chants montaient ensemble sur des portées rapides comme les
entrelacs d'un torrent dont les eaux se mêlent au
confluent, écument et se mélangent, puis
se hâtent de plus en plus vite vers le
chenal traçant une sortie unique et large emportant les mêmes larges feuilles. Mais il y a un rocher. Elles se
séparent.
Le
soleil tombait en pans aigus dans la pièce.
Quoi
que ce fut qu'elle touchât, la lumière devenait plus crue avec une existence fanatique
exacerbée
Une
assiette devenait un lac blanc, un couteau une dague de glace. (un stalactite).
Soudain des verres se révélaient soutenus par des zébrures de lumières (des
raies de lumières)
Les
tables et les chaises émergeaient comme si ayant préalablement coulé elles
surgissaient à nouveau, elles refaisaient surface, recouvertes d'une mince
pellicule rouge, orange, violette comme le duvet sur la peau d'un fruit mûr.
Les veines sur la glaçure (le vernis, le brillant) de la porcelaine, le grain
du bois, les fibres du cannage se précisèrent plus finement. Rien n'avait
d'ombre. Un pot était tellement vert que l'oeil semblait aspiré par le tunnel de
son intensité et restait collé dessus comme un mollusque, une bernique
Puis
les formes prirent du volume et des contours. Là on distinguait la courbe d'une
chaise ; là la silhouette d'une armoire. Et à mesure que la lumière augmentait des
tâches d'ombre y pénétrèrent, s'accumulèrent et se répandirent en de multiples plis
et replis sur l'arrière plan.
Scintillement avant le jour—ni silence ni mystère—les seuls chants d’oiseaux—mouvements invisibles du vent—lorsque l’herbe ondule—tremblent les arbres—mouvements imperceptibles—mouvements faits de rien—les vents agitent les arbres—les vents croisent et emportent des oiseaux—l’aube comme une vallée sombre entre le jour la nuit.
samedi 18 mars 2023
Lectures
"... Co-naître implique de rencontrer, de vivre avec. Cela impose une relation, un engagement, une prise de risque. Cela implique d'être vécu ... Le marin peut connaître la mer, la ressentir, la comprendre intuitivement, sans pour autant savoir grand chose sur elle. A l'inverse, l'intellectuel peut savoir beaucoup de choses, sa salinité, sa température, la circulation océanique, sans jamais être allé en mer, sans la connaître. Ce savoir distancié, hors sol, s'il n'est pas mis au service de la connaissance, du vivre avec, ne m'intéresse pas. Plus important encore, alors que la connaissance m'inclut dans le monde, qu'elle me fait comprendre que je lui appartiens et qu'en conséquence je ne peux pas en disposer, le savoir, lui, me laisse croire que je suis extérieur à la nature que j'étudie de loin et que je peux exploiter à ma guise. La connaissance ouvre sur le vivre ensemble, c'est une relation dynamique, un enrichissement réciproque sans cesse renouvelé, qui ne se nourrit pas nécessairement de chiffres. "
François Sarano, entretien Actes Sud "Réconcilier les hommes avec la vie sauvage"
F Sarano est océanographe, plongeur professionnel, conseiller scientifique du ct Cousteau, co-fondateur de l'association Longitude 181 dont l'objectif est la protection des océans.
mardi 14 mars 2023
interlude 4.1 p.92 Oiseaux déréglés
Oiseaux déréglés, chaque année moins de doigts pour les compter.
Aucun jacarini sautant sur place les ailes en l'air pour montrer à sa
femelle sa tache blanche.
Rouge-gorge solitaire. Est-ce le/la même chaque année ? Combien
de temps vit un oiseau ?
Des pigeons, ça oui. Lundi dans le jardin, un ramier égorgé, un
éventail de plumes.
Quelques mésanges et quelques pies. Un pivert revenant, quelques pinsons
des arbres et trois moineaux.
Aucun petitduc faisant escale après avoir parcouru
Aucune perdrix rouge guettée par l'autour des palombes
Pas de cassiques cul jaune de Guyane dans son nid tressé et
suspendu
Pas de picolette précieuse qui sait tout chanter et en paye le prix
je pense au silence de confinement rempli d'oiseaux, au cri de chouette
dans les films, dès que l'atmosphère est crépusculaire
je sais bien que vous ne chantez pas pour me faire plaisir, que vous avez votre vie, mais comment vous dire que je suis contente que vous le fassiez
Et tous ces plumages, ces ramages, ces crêtes, ces chants cette
créativité infinie. Stridence, passion, véhémence, murmurations des étourneaux.
Psychologie du désastre. Je reste attentive, je compte sur vous
à partir de la phrase p.93 They sang, exposed without shelter, to the air and the sun" ils chantaient bien en vue, sans abri, pour l'air et pour le soleil,
Ma traduction
Le soleil, à présent levé, ne reposait plus sur un matelas vert, jetant un coup d’œil furtif à travers l'eau scintillante comme des bijoux, révéla sa face et piqua droit au-dessus des vagues. Elles tombaient avec un bruit sourd régulier. Elles tombaient comme fait le martèlement des sabots des chevaux galopant sur le gazon. Leur écume s'élevait comme le jet de lances et de sagaies au-dessus de la tête des cavaliers. Elles balayaient la plage de leur eau bleu-acier parsemée de diamants. Elles allaient et venaient sur le rivage avec l'énergie, la musculature d'un moteur qui déploie et réintroduit sa force. Le soleil tombait sur les champs de maïs et sur les bois. Les rivières devenaient bleues et enchevêtrées comme des tresses, les pelouses qui descendaient jusqu'au rivage devinrent vertes comme les plumes des oiseaux qui ébouriffent doucement leur plumage. Les collines courbées et enserrées, comme liées par des lanières, à l'image d'un membre lacé par ses muscles ; et les bois qui se hérissaient fièrement sur leurs flancs étaient comme la crinière bien taillée sur l'encolure d'un cheval.
Dans le jardin là où les arbres se tenaient lourdement au dessus des parterres de fleurs, des étangs, et des serres, les oiseaux chantaient dans le chaud soleil, chacun en solo. L'un d'eux chantait au-dessus de la fenêtre de la chambre, un autre sur le plus haut rameau du lilas ; un autre sur le rebord du mur. Chacun chantait de manière stridente, avec passion, avec véhémence, comme pour expulser le chant et peu importait si ce chant dissonait avec le chant d'un autre oiseau. Leurs yeux ronds brillaient de mille éclats : leurs serres agrippaient le rameau ou la rampe, ils chantaient bien en vue, sans abri, pour l'air et pour le soleil, magnifiques dans leur plumage tout neuf, veinés de nacre ou éclatants, ici strié de bleu pâle, ici éclaboussé d'or, ou rayés d"un duvet brillant.
jeudi 9 mars 2023
à découvert
à découvert
dans l’éblouissement du bleu émaillé
une chaîne de chants aux tons déchirés
écarquille les quartiers d’air en volutes indécises
fragmente l’atmosphère en passerelles de sons
et l’éclatement des notes tentaculaires
se ramifie telle une tache d’encre diluée
sur une feuille de papier humide et des arabesques
s’esquissent se tracent une forme prend vie
à la verticale d’un tourbillon
klasma écrit en écho à la première partie de l'interlude 4 des Vagues dont voici ma traduction:
Le soleil, levé, et non plus couché sur le matelas vert, décochant des coups d’œil intermittents au travers des joyaux délavés, dévoilait sa face et regardait droit par-dessus les vagues. Elles tombaient en un bruit sourd, régulier. Elles tombaient en une trépidation de sabots de chevaux sur le gazon. Leurs embruns augmentaient comme le ballottement de lances et de sagaies au-dessus des têtes des cavaliers. Elles balayaient la plage d’une eau bleu acier aux pointes diamantées. Elles allaient et venaient avec l’énergie, la musculature d’un engin qui déferle de vigueur encore et encore. Le soleil tombait sur les champs de blé et les forêts, les rivières devenaient des multitudes de tresses bleutées, les pelouses qui descendaient vers le bord de l’eau, devenaient vertes comme des plumes d’oiseaux ébouriffant doucement leur panache. Les collines, arrondies et enserrées, semblaient reliées à l’arrière par des lanières, tel un membre attaché par des muscles ; et les forêts qui se dressaient fièrement sur leurs flancs étaient comme une crinière coupée ras au cou d’un cheval.
Dans le jardin,où les arbres se dressaient, touffus au-dessus des plate-bandes, des étangs, et des serres, les oiseaux chantaient sous la chaleur du soleil, chacun pour soi. L’un chantait sous la fenêtre de la chambre ; un autre sur la plus haute brindille du lilas ; un autre sur le rebord du mur. Chacun chantait avec véhémence, avec passion pour que le chant jaillisse jaillir hors d’eux, et peu importait qu’il se brise sur le chant d’un autre oiseau en une âpre dissonance. Leurs yeux ronds se gonflaient d’éclat ; leurs griffes s’agrippaient aux rameaux ou aux barreaux. Ils chantaient, à découvert sans abri, face à l’air et au soleil, magnifiques dans leur plumage neuf, veiné comme un coquillage ou émaillé de lumière, barré ici d’un bleu doux, là éclaboussé d’or, ou rayé d’une plume brillante. Ils chantaient comme si leur chant leur était arraché sous la pression du matin.
vendredi 3 mars 2023
Chemins de traverse
Pour me rappeler à vous et partager des moments de tendresse, quelques mots écrits hier soir, de ma fenêtre. Il me faut reprendre l’écriture, lentement, laborieusement, laisser remonter les images, les impressions fugitives comme ces bourgeons qui « savent » le printemps bien avant que nous nous en apercevions. Désolée pour cette longue absence, l’hiver de la saison et de l’âge m’avaient « gelée », recroquevillée, je ne savais plus que lire vos mots pour m’y réchauffer.
« Une belle lumière du soir, non plus une lumière d’hiver,
celle-ci est plus bleue, plus vibrante que les violets, orangés d’un coucher de soleil hivernal
dont on sent la dureté annonciatrice de la morsure de la nuit.
Aucun souffle d’air, une lumière douce, difficile à définir.
Ici, derrière la fenêtre de chambre ouverte,
(rue J d’Arc, c’était au-dessus du cerisier que j’écrivais mais toujours collée à une fenêtre, sur ma gauche), je ne ressens pas du tout de froid, les t° glaciales le matin se sont beaucoup radouci en journée.
Le long du Roubion, pâquerettes, primevères, bourgeons des arbres ... tout sort timidement, rien n’explose encore mais sort à peine la tête pour se protéger des nuits froides, pas folles les plantes.
Je viens de m’accouder à la fenêtre pour tenter de découvrir les mots et écrire cette lumière.
Rien à faire, « j’entends » les oiseaux pépier, je perçois comme une sorte de « rumeur », des ondulations au-dessus des cheminées, pas de la fumée, de la chaleur qui irradie, mais rien sur la lumière.
Ou peut-être si : transparente,
oui, ciel blanc traversé d’une lumière transparente comme de l’eau claire qu’on peut entendre dans le silence.
Le soleil doit être sur l’horizon, là-bas, derrière la ligne du vieux village, au-delà des collines, mais sans rougeoyer.
C’est tendre, paisible et fait du bien ».
PS : la photo est aussi pauvre que mes mots, tout est beaucoup plus bleu et lumineux, plus beau quoi !