mardi 31 mai 2011

Assises Internationales du Roman 2011

Les Assises Internationales du Roman (Subsistances, Lyon du 23 au 29 mai 2011) sont closes.

Comme chaque année, j'y étais aussi souvent que possible pour … y découvrir de nouveaux auteurs … mieux comprendre ceux que j'aime déjà … m'enrichir des débats...

Cette année, P. Quignard, déjà beaucoup lu et aimé, nous a montré comment chacun de ses livres étaient « attaché » à une musique, et pour chaque ouvrage abordé nous a proposé l'écoute d'un extrait musical, démontrant ainsi, une fois de plus, que chaque créateur « bricole » ses propres méthodes.

Une découverte pour moi, l'éthologue, primatologue F. de Waal qui nous a parlé avec beaucoup d'images et d'humour de ses travaux. Pour hyper-simplifier : nous sommes des animaux même si nous nous croyons supérieurs. Lorsque nous voulons qualifier un acte humain de cruauté ou de torture, nous le qualifions de bestial et d'autres qualificatifs issus du vocabulaire animal, alors que l'animal connaît l'empathie, la réconciliation …

L'écrivain David Grossman (Israël) s'est engagé depuis longtemps en faveur de la paix dans le conflit israélo-palestinien. Ses livres sont traversés par des réflexions sur l'identité israélienne et sur la peur de l'autre qui alimente la violence. La conviction de ce pacifiste nous a fait partager l'horreur de vivre depuis 64 ans en état de guerre perpétuelle.


Mais, comme d'habitude, ce ne sont ni les découvertes d'auteurs, ni les débats, ni rien de prévu au programme qui ont, tout à coup, ouvert une large brèche en moi, une déchirure, un long zébrage d'éclairs, au détour d'un mot, d'une phrase totalement inattendus.


L'acteur, Martial Di Fonzo Bo est venu nous lire des passages de « Lettres aux hirondelles et à moi-même » de Ramon Gomez de la Serna (Espagne 1888-1963), et brusquement, la salle s'est ouverte, les hirondelles zigzaguaient sous la verrière.

« Vous glissez sur le zéphyr bleu et quand vous effleurez les eaux lisses de l'étang vous le faites vibrer comme si une note de musique parcourait la sensibilité du monde.Vos ailes s'étirent dans leur vol et vous vous imprégnez d'aube et de crépuscule, au point d'arriver au soir, volant plus bas, sifflant presque au ras du sol, comme faisant vos adieux aux soleils couchants ; vous serrant ensuite dans vos nids, car vous refusez qu'on vous confonde, ne serait-ce qu'un instant, avec les chauves-souris. Déchainez encore votre joie et ne cessez de nous offrir ce si joli spectacle de celles qui courent comme pour se jeter dans les bras de quelqu'un »

Et depuis, je chavire, matins et soirs, je guette le vol des hirondelles (moi qui croyais avoir oublié Manufrance, me voilà encore avec « les hirondelles »). Samedi après-midi, yeux clos, allongée sur une chaise longue aux Subsistances, entre deux tables rondes, j'entends de très jeunes enfants qui s'égaient, rient, courent et produisent exactement les mêmes cris de joie, allégresse et vivacité.

Puis, l'acteur commence à lire des extraits de « Lettres à moi-même ».

Mais d'abord, pourquoi la lettre ? Qu'y trouve l'auteur ? Dans sa présentation du livre (André Dimanche Editeur), Jacques Ancet écrit : « parce que la distance fictive instaurée par la lettre lui permet d'établir un dialogue avec le monde (les hirondelles) et avec soi (moi-même), d'accéder à une vérité plus profonde que dans tout autre écrit, puisqu'elle permet d'échapper à l'identité qui vous colle à la peau et vous claquemure dans la boîte d'os de votre propre cerveau, réaffirmant, après beaucoup d'autres, l'essentielle altérité du sujet de l'écriture. Ramon réussit par là, temporairement du moins, à échapper à l'angoisse de la solitude et de la claustration en lui-même »

Extraits :

« Aujourd'hui c'est encore et encore le même jour, car le monde ne connaît qu'un seul jour, qui se répète et se répètera jusqu'à la fin du monde. Ce qui fait la différence de ce jour unique ce sont les pensées, les événements politico-guerriers, les faits divers crapuleux. …. Ne crois pas que j'ignore qu'il me faille aller vers cette vallée ultime, où il n'y a personne et où l'on n'entend pas siffler le train. Dès que je perdrai l'équilibre et tomberai à la renverse dans le fauteuil où j'écris, je sais bien que j'entrerai dans cette vallée solitaire, et son jour plein de crépuscule. Je veux retarder l'événement et donc je prends des médicaments, je prends le soleil dans un patio, je prends des cours de langue pour parler avec le néant du trajet, le temps d'arriver au lieu où il n'est pas besoin de mots, où l'on a l'éloquence de la lumière. Je lézarde et lézarderai longtemps avant d'arriver à cette vallée ultime, mais je sais bien que je suis en chemin – je l'ai été dès ma naissance ; tout vient à point à qui sait attendre. Les images me distraient pour m'empêcher de trouver la non-image, qui est la véritable image. »

Que n'avons-nous connu ce livre l'an passé en atelier sur les lettres ?

Autre éclair : F. Noiville interview D. Grossman et lui demande « Quel est votre noyau dur, ce qui vous tient debout ? » et ajoute « Est-il vrai qu'en hébreu, noyau dur, se dise, vertèbre cervicale ? ».

D. G. acquiesce et mon esprit explose. Que sont ces maux depuis deux ans, cette hernie discale-cervicale dont je souffre ? Pourquoi ? Quel noyau dur est atteint ? Et mon corps, mon cerveau mâchent, ruminent, triturent ce qui m'a soudain assaillie : l'écriture de Ramon, les lettres, le noyau atteint …

Qui rédigera le programme où j'aurais pu trouver cela pour ces 5èmes Assises ?

Fatiguée, saturée d'informations et d'émotions, des piles de livres et des titres pour une année, deux moments magiques m'ont retournée comme un gant, chair à vif. De la vie, c'est ce que j'attends, des instants tels que ceux-ci.

jeudi 26 mai 2011

Lisbonne




Pour les souvenirs ...ou pour le désir et pour la nostalgie du vent frais de la Mer de Paille

mardi 24 mai 2011

chute d'O

«tu vas dans ton jardin ?»

ce sont

ses derniers mots

pour amortir ma chute

liquide

s’il avait dit

«o

aurais-je dit

«oui»

quelle belle paire de on

nous ferions

à l’improviste

«c’est un secret»

j’ai dit

oui

mon jardinet secret

une porte s’entre-baille

bat au vent

oscille

vacille

se fendille

lattes disjointes

déclavetée

éclatée

blessée

plaie ré-ouverte

encore

tout cacher

en rire

son désir

dormir à la cabane

«en diagonale peut-être»

moi à même le sol

contre la terre

près des pissenlits

cheveux dans l’herbe

ne craindre pas

la rosée

du matin

nuit avec lu luit

au coeur de mon jardin

secret


lundi 23 mai 2011

chat

ce
jour
ce
chat
sans
cri
dans les bras
de
serge
dans les bois
sa
sha
au goûter des enfants
ce chat
s'est endormi
sa sha-nt
à cinq ans
que c'était
fini
plus de moteur
pluie
mot
heurt
chut
Shin
Gyo

dimanche 22 mai 2011

CATALOGUE DU DIMANCHE SOIR!

Il es dix-neuf heures, un dimanche soir comme beaucoup d'autres. La table de la cuisine est recouverte d'un revêtement anti-dérapant vert à piqûres blanches et rouges. LE CATALOGUE y est posé dessus. Sur le buffet, la radio Ducretet-Thomson nasille les nouvelles du soir. A côté de moi, ma belle-mère habillée de noir, une mort a dû advenir récemment, et qui tricote, même le dimanche, rare activité autorisée par le Seigneur je présume!
Je crois que je l'ai toujours vue des aiguilles à tricoter dans les mains! Elle avait le geste vif et précis et ses tricots, les écharpes, ses chaussettes et ses bonnets auraient pu figurer en bonne place dans LE CATALOGUE. Et la valeur des kilomètres de laine ajoutés auraient pu habiller pour le moins tous les habitants de la ville DU CATALOGUE.
Mais le tricot m'agaçait, elle m'agaçait avec ses reproches constants:"Tu ne sauras jamais rien faire de tes dix doigts!" Et non! Moi, pour le moment j'ai surtout envie qu'elle se taise! Et fait rarissime, c'est le jour et l'heure où elle se tait! A la radio, les nouvelles sont finies et l'émission hebdomadaire du dimanches soir va commencer.
Je ne saurai jamais expliquer pourquoi elle écoutait avec autant de religiosité cette émission à laquelle je crois pouvoir dire elle ne comprenait pas grand chose! La magie des voix peut-être!
Je vais alors pouvoir ouvrir LE CATALOGUE. " Fais attention!" me fait-on remarquer non sans agressivité. Délicatement, je prends la couverture cartonnée légèrement écornée à droite, mordorée cette année-là, les lettres MF écrites en gros, accolées comme pour se tenir chaud, entre mes doigts. 1969: jusque là, rien d'érotique! Sommaire et puis je vagabonde entre les pages.
Ma fantaisie n'a d'égale que la discussion passionnée qui s'engage entre François Régis Bastide et Jean Louis Bory et qui s'envenime pour savoir qui de Fellini dans "Le Satyricon" ou de Bunuel dans "Tristana" a le mieux réussi à traduire les miasmes de notre société et qui de Magali Noël ou Françoise Fabian a le mieux incarné leur faire-valoir?
Et ma belle-mère qui n'a jamais mis les pieds dans un cinéma écoute comme si le temps était suspendu!
Je continue mon vagabondage: fusils Robuste, bicyclettes Hirondelle, machines à coudre Omnia, cannes à pêche, épuisettes, chaussures de protection, tourne-disques, auto-radios, couvertures chauffantes défilent, se bousculent devant moi en un grand carnavaval monochrome.Sur les ondes, Jean Louis Bory s'époumonne et veut absolument restituer l'oeuvre dans son temps pour aider le spectateur à comprendre.
J'ai toujours aimé cette voix fragile, le phrasé particulièrement articulé aux arguments subtils et intelligents. Tandis que j'en arrive insidieusement aux pages des sous-vêtements. Le pilou y est à l'honneur et rien de vraiment excitant dans les soutien-gorges et petites culottes conçus pour un maintien maximum dans un minimum de pouvoir érotique. Mais ma belle-mère veille au grain et à mon éducation, peut-on dire sexuelle, et je dois quitter rapidement les pages sulfureuses du CATALOGUE MANUFRANCE et me replier sur les pages mobilier: étagères en okoumé, bureaux bien plantés sur leurs quatre pieds, fourneaux, cuisinières quatre feux... J'ai eu le temps de meubler ma future maison, me confectionner un trousseau, choisir mon matériel de jardin, m'assurer de leur technicité sûre et de leur solidité certaine.
Quelques mots encore sur Eric Rohmer et "Ma nuit chez Maud"et l'émission "Le Masque et la PLume" s'achève sur une pirouette des chroniqueurs et quelques applaudissements. Ma belle-mère se lève: "Ferme LE CATALOGUE et mets la table!" Le retour à la réalité est rude et rugueux comme la voix que je viens d'entendre. Elle éteint la radio, je ferme ma liberté du dimanche soir avant que d'avaler mon potage aux vermicelles.

vendredi 20 mai 2011

Oh toulouse


Madame/Monsieur Lin
Lors de votre voyage du 20/05/2011 dernier, votre vol a été retardé. Nous vous prions de bien vouloir accepter nos excuses pour les inconvénients qui ont pu en découler. Cet événement ne reflète pas le niveau de qualité que nous souhaitons vous offrir. Nous souhaitons vous assurer que nous travaillons de manière constante à l’amélioration de notre ponctualité.En souhaitant que votre prochain voyage sur nos lignes vous donne entière satisfaction, veuillez agréer, Monsieur/Madame, nos respectueuses salutations.Le service client Air France.

énervements, que se passe-t-il ? la java est là, minutes qui passent, aucune information. Savoir ah... où ? porte 18, ah... que fait-on ?
nous regrettons de vous informer que votre vol AF7843 TOULOUSE TLS - LYON LYS du 20/05/2011 est retardé.

porte 35, pas d'information, porte 18, pas de renseignement, alors ? quand la java va... vol... ou prendre une voiture à plusieurs ? rentrer en 6h à lyon et se relayer? accepter l'eau proposée très gracieusement par la compagnie. Attendre, dormir ce week end dans l'aéroport de Blagnac... ne serait-il pas plus sage de prendre cette voiture ? Oui ! Mais le temps passe... aller on s'en va ? Comment ? Voiture : deux pour, trois contre. On attend encore... Attente. Deux femmes, paraissant le même âge, une 48 l'autre 60, déjà amies.
on y va, pour la java ou le jazz?

Le départ est désormais prévu à 20:18.

Alors hôtesse gentille où en est-on? L'hôtesse se renseigne, l'avion part-il de Paris pour venir ici à Toulouse et nous ramener à lyon ? attendez, gentils passagers... vos confrères parisiens sont dans l'avion, zzz... assis, en place, attendez... Pas sûr, grève spontanée, l'avion volera-t-il ? pourquoi le ferait-il pourquoi ne le ferait-il pas ? Baf... un papier dans le journal accusant les pilotes du vol paris-rio? un vague conflit sur la nouvelle structure des pilotes qui se met en place ici ? Un syndicat minoritaire dit-on ? Confinés dans la prison blagnacienne... il y a pire, paraît-il, à New York dit-on... on ne sait... attendez encore avant d'aller prendre une voiture... Vous là... que fait-on on s'en va?

Nous regrettons de vous informer que votre vol AF7843 TOULOUSE TLS - LYON LYS du 20/05/2011 est encore retardé mais prévu, peut-être...

s'il est prévu c'est que c'est bon ? va pour le zaa ! Allo L'hôtesse : il y a un (nouveau) pilote dans l'avion ? Oui ! Quand le jazz est là on s'en va ! Allons trinquer au bar/do avec l'eau la moins chère offerte par la compagnie aérienne, quand la java s'en va alors le hasard tricote des vies ; il n'y a pas de hasard dit-on, ah, pourquoi cette attente juste pour nous, tous les autres avions sont partis ? Des vies se croisent entre la porte 18 et la porte 35; profitons-en-jazz... des mots vite dits, pas le temps de décliner le curriculum, on va à l'essentiel, et en quelques notes s'il te plaît (s)Miles on est à Toulouse! Des touches de soi en moins de mots qu'il ne faut de minutes qui s'effilochent pour les dire, dans le temps d'une demie grève, en moins de notes qu'il n'en faut pour danser la javanaise, en une basse , une batterie, deux clarinettes et un saxophone, demain à Lozanne sur Azergues, Lyon, Canne, Grenoble, Clermont, Paris ou Saint-etienne ; jazz...
Le départ est désormais prévu à 20:35.
grève improvisée, impro toulousaine, qui ne touchera que le vol AF7843 de 18h10 parti à 20h35...

Une touche à la fois

J'étais en train de faire du vélo à gauche et du camping à droite et j'attendais que l'amour vienne.
- Bonjour dis-je, êtes-vous des chasseurs français ? 
- Faites excuse Mademoiselle mais nous, nous sommes des pêcheurs à la ligne français.
- Oh pardon ! dis-je je n'y connais rien c'est vrai que vous n'avez pas de casquette ; mais ça ne fait rien vous êtes drôlement bien gaulés, surtout vous, le 125 , dommage que je n'aime pas les moustaches, et vous le 435, je vois que vous êtes plutôt latex, ça intéresserait sûrement ma copine Bé, ne bougez pas, je vais lui dire de venir voir l'expo, au MAI y a un accès handicapé. Je vous préviens, parfois elle n'est pas commode. -
- D'accord, de toutes façons les pêcheurs ça aime bien attendre que ça morde

jeudi 19 mai 2011

ah mon hirondelle ..




nous mettons les cyclistes en garde contre les procédés employés par certains individus qui cherchent à tromper la bonne fois des acheteurs en prenant des marques et des titres similaires à ceux des maisons les plus honorablement connues et réputées

afin d’éviter d’être trompé à ce sujet bien prendre note que nos cycles portent tous sur le tube de direction, la marque de fabrique ci-dessous


manufacture d’armes et cycles de saint-étienne

et sur le tube allant de la direction au pédalier l’inscription suivante


hirondelle saint-étienne


hirondelle «outil» modèle n°1 pour homme

hirondelle «outil» modèle n°2 pour dame

hirondelle «routière légère» modèle n° 3 pour homme

hirondelle «routière légère» modèle n°4 pour dame

hirondelle «type» modèle n°5 pour homme

hirondelle «type» modèle n°6 pour dame


pour qu’un cycliste soit irréprochablement monté il faut que tous les organes de sa bicyclette aient des dimensions et des formes exactement appropriés à sa taille, à sa force, à son poids et à ses goûts


hirondelle «demi-course» modèle n°7 pour homme

hirondelle «course» modèle n°8 pour homme

hirondelle «passe-partout» modèle n°9 pour homme


une bonne bicyclette doit être faite sur mesure

réfléchissez que votre existence peut dépendre de la bonne et consciencieuse fabrication de la bicyclette que vous allez acheter ; ne vous laissez donc jamais tenter par le trop bas-prix il pourrait vous couter la vie


hirondelle «passe-partout» modèle n°10 pour dame

hirondelle «luxe» modèle n°11 pour homme

hirondelle «luxe» modèle n°12 pour dame


si l’on vous fait miroiter qu’en achetant une bicyclette sur place vous aurez toujours le réparateur sous la main, rappelez-vous que nos bicyclettes «hirondelle» sont irréprochablement construite et n’ont pas besoin de réparateur


hirondelle «grand-luxe» modèle n°13 pour homme

hirondelle «grand-luxe» modèle n°14 pour dame

rétro-direct hirondelle «type» modèle n° 15 pour homme


barcelone 28 août, "vraiment je suis charmé et très satisfait de la fabrication de ma bicyclette «hirondelle» ; les roulements sont d’une grande douceur et l’ensemble est irréprochable ; je la recommande à tous mes amis"


rétro-direct hirondelle «luxe» modèle n° 17 pour homme

rétro-direct hirondelle «luxe» modèle n°18 pour dame

rétro-direct hirondelle «grand-luxe» modèle n°19 pour homme


si la bicyclette que nous vous adressons ne vous plait pas vous ne serez nullement tenu de la garder ; nous reprenons sans difficultés toutes machines qui, après examen ne satisfait pas entièrement l’acheteur


le sellera (espagne), 15 septembre "je suis très content de ma bicyclette «hirondelle» qui me rend de grands services ; elle a été essayé par un de mes amis connaisseur en cyclisme et il me dit que l’on ne peut rien désirer de mieux et que sa construction et son mouvement sont excellents"


rétro-direct hirondelle «grand-luxe» modèle n°20 pour dame




Catalogue partie 2

Le catalogue de Manufrance fut donc le premier. D’autres suivirent car on ne peut guère se satisfaire que d’une seule étreinte. Dans la nudité entrebâillée de ses pages, j’ai appris à soulever les voiles d’un univers sans risque, à errer voluptueusement dans cette langueur qu’exige le songe. D’autres catalogues généralistes, La Redoute , Les Trois Suisses ont donc pris la relève. J’ai feuilleté, comparé les qualités, jugé les promotions, rêvé d’endosser  ces tenues mirobolantes offertes à mon regard,  calculé mes réductions, consulté la page des mesures, évalué les tours de taille, bassin ou poitrine, rempli des bons de commande que je raturais, faisais patienter quelques jours sur un coin de bureau, oubliais et redécouvrais quelques semaines plus tard, parfaitement obsolètes… Ce temps passé dans les méandres de pages glacées, à suivre le fil d’une recherche qui n’est pas celui qu’on pense, avec un sentiment d’oubli, de liberté reconquise, suffisait à mon bien-être.
Parallèlement, j’accumulais les catalogues de maison d’éditions de livres. Il me fallait toujours le dernier paru sur lequel je me précipitais afin de cocher les livres en ma possession – rayés rouge – , les livres lus mais que je n’avais pas  - simplement précédés d’une croix rouge –, les livres lus et possédés – avec croix et trait rouges – , les livres qu’il me fallait absolument  - cernés d’un trait rouge - , ceux qui pourraient encore attendre -  cernés d’un trait vert - . Le bonheur suprême résidant dans la totalité des titres d’un auteur raturés. Je comptabilisais le nombre de croix, vérifiant ainsi ma progression de lectures… Je notais ensuite sur un petit papier, qui serait glissé dans mon sac, la liste de livres à acheter ou à emprunter à la bibliothèque. Et c’est là que s’insinue  quelque peu la poésie, au coeur de cette plongée apparemment rébarbative …Car ce sont les mots qui guidaient mes désirs, les mots des titres m’entraînant dans ces replis d’ombres où le jour peut recommencer.

 Tendre comme le souvenir / L’espace d’un cillement

Au-delà de l’absence / Le bleu du ciel

Traduit du silence / La complainte du sentier

Me serais-je éloignée du catalogue de la Manufacture d’armes et de cycles de Saint Etienne ? Pas tant que cela… Le vagabondage offert , la richesse d’un vocabulaire que l’on ne maîtrise plus guère, la densité des  pages et la variété des produits proposés étaient dignes d’un dictionnaire , d'une encyclopédie, d’un roman russe, ou des collages surréalistes…

Au coeur des ténèbres / Le calice de la vie

Derrière la porte / Fragments d’un paradis

Voyage de l’autre côté /Le stéréoscope des solitaires

Désuétude , pas vraiment, vu le nombre de catalogues qui envahissent ma boîte aux lettres....Mais soyons moderne, le catalogue des catalogues aujourd'hui , c'est bien évidemment Google, où la poésie s'infiltre  aussi pour celui qui sait lire entre les lignes....

lundi 16 mai 2011

Catalogue partie 1

Après tout ce fut lui mon initiateur à ces plaisirs irracontables ou presque… Lui qui , lorsque j’étais enfant, m’apprit à donner au temps une dimension qui ne se mesurait qu’à l’aune de mon désir. Lui encore qui peupla mes rêves d’images surannées où je mettais mes propres couleurs. C’est avec lui que je passais mes jeudis après-midi, avachie sur une mauvaise chaise, à m’abimer les yeux sur ces mots enchâssés et à m’engloutir dans une reptilienne rêverie au coeur du charnier des images. Lascivement, j’abandonnais mes doigts sur ces trésors célés, levant les voiles d’un univers inaccessible et, frissonnant dans mes élucubrations, de méandre en méandre, m’inventais des histoires éperdues. Je passais  outre les cent cinquante premières pages qui n’étaient sources d’aucune rêverie, et m’envolais vers les “Hirondelles” qui m’entrainaient dans des périples verts avec les gardeboues ( c’était en un bloc solide…) et les pneus ballons garantis sans crevaison – çà c’était indispensable  - et puis bien sûr la bicyclette aurait un petit timbre à deux tons pour rivaliser avec les oiseaux et  serait bleue afin de me rendre invisible lorsque j’aurais atteint l’horizon.                
 Il y avait les pages des jouets, moins variées que sur les catalogues modernes,  avec les jeux de tonneau, les patinettes, les petits billards. il y avait les pages d’instruments de musique où résonnaient les musiques que j’inventais ( j’ai bien eu ce piano jouet au son métallique un peu faux, au son indéréglable….). Il y avait les pages des bureaux avec leurs nombres infinis de tiroirs où tout pourrait  enfin se dissimuler à la vue. Et il y avait par dessus tout la page des coffrets à ouvrage, particulièrement ce que l’on nommait “les travailleuses”, avec ces casiers superposés s’ouvrant en éventail, et une poignée  sur le dessus pour le transport. Si l’un d’entre vous possède ce genre de coffrets , cherchez bien , sous les fils, aiguilles, morceaux de tissus bigarrés, ciseaux ou autres objets de la couturière que je ne suis pas, vous trouverez peut être les secrets d’une petite fille qui n’avait que des rêves de papier à tripoter, des mots à ressasser – bouterolles, brucelles, coulisseau, embases, happes, zéphir – , des images perdues d’où surgissait parfois le chemin d’un égarement toujours plus grand.

dimanche 15 mai 2011

mots en èd

pour comprendre le langage des bébés
pour rêver du ciel
pour parler
pour se taire
pour les étudiants
pour ne plus entendre parler de dsk
pour voir, juste
pour dire bonjour
pour ne plus souffrir de migraines
pour se former
pour trouver du manque
pour créer un business
pour lutter contre l'anxiété
pour écouter les anciens
pour s'alimenter
pour retrouver des personnes disparues
pour bénéficier de différentes aides
pour créer
pour changer la façon dont on se comporte
pour se familiariser
pour trouver de bons skis
pour comprendre thunderbird
pour entendre
pour trouver des services dans une ville
pour ne plus écrire pour

samedi 14 mai 2011

Chasseur français, la suite

J'étais sur le quai du métro et j'attendais que l'amour vienne. Son ombre le précéda : Etes-vous un chasseur français ? Demandais-jeJe suis  plus que cela annonça-t-il, je suis  Le chasseur français
Nom d'une pipe de St Claude ! C'est vrai que vous avez un gros fusil  ! répondis-je Je ne vous ai pas reconnu tout de suite avec votre nouvelle casquette : le soleil m'aveuglait, à moins que ce ne soit vous ?   Oui, Le chasseur français aime beaucoup la casquette ; et vous,  vous portez bien le Charmot
photo CY


mardi 10 mai 2011

écrire, Duras



"l'insulte, c'est aussi fort que l'écriture. C'est une écriture mais adressée"
"c'est l'inconnu qu'on porte en soi: écrire, c'est ça qui est atteint. C'est ça ou rien"
"C'est l'inconnu de soi, de sa tête, de son corps. Ce n'est même pas une réflexion, écrire..."
"je crois que c'est ça que je reproche aux livres, en général, c'est qu'ils ne sont pas libres. On le voit à travers l'écriture: ils sont fabriqués, ils sont organisés, réglementés, conformes on dirait. (...) L'écrivain, alors il devient son propre flic. J'entends par là la recherche de la bonne forme, c'est-à-dire de la forme la plus courante, la plus claire et la plus inoffensive" (Marguerite Duras, Ecrire)

vendredi 6 mai 2011

dimanche 1 mai 2011

Journée ordinaire

cela commence par une vague au milieu de l’euphorie ; un remue-ménage des tripes suivi d’un léger vertige dans un levant trop brusque ; l’image de la nuit et une porte cochère semi-ouverte ou semi-fermée – affaire de point de vue ; là ce sera devant et semi-ouverte ; tables mises pour une fête ; personne ; quelques-uns arrivent pauvres de quelques bouteilles dans la cour d’immeuble grise et disponible pour l’égaiement ; froideur pourtant sortie du rêve nocturne par la porte semi-fermée ; immersion du présent dans du passé régurgité par la confusion des mots dispersés en semis et lapsus et images brûlées par la nuit ; il y a eu la relecture du journal intime d’une année d’où surgit le mot inavouable dans une réalité refusée durant ces mois de mots saisis sur le vif ; difficile rappel en double simple ; impulsion de dé-écrire d’un clic ‘suppr’ nerveux ; même mort le mot gagne encore de par les résurgences des émotions fébriles en ces semaines cochères sans eau ni en-vie sauf de refermer la tristesse d’un bond définitif et d’aller vers l’autre et malgré cela qui commence ; une vague rappelle l’odeur de la culpabilité /
terminés les mots gris et les formes verbales agonisantes ; le jour d’hui est ordinaire clair comme le ciel de ce printemps aoûtien ; mots ordinaires ; un voisin vient d’annoncer la défaite en joie de son invisible auditeur téléphonique portatif criant puis raccrochant et chantonnant en mettant la table satisfait de sa satisfaction donneuse de peines ; il porte une ombre dans la transparence de l’air : pourquoi des hommes maigres et nerveux s’accouplent-ils avec des femmes graisseuses et lascives ; une affaire d’emboîtement d’âmes malchanceuses ou fainéantes au moment de se réincarner ; le mystère se décale du côté de la laverie automatique ; les machines à laver ont-elles une âme et avec quelles sécheuses s’emboîtent-elles pour la vie /
au creux de la vague au loin près de la bouée jaune ce n’est pas un rocher semi-noyé mais un nageur ; au bas de la vague avortée un monticule de sable mouillé le dissimule progressivement ; enregistrement automatique des images égrainées par le vent ; où cela mènera-t-il sans fin ni transition ; l’odeur qui reste après la lecture du récit du fils de vingt ans décédé subitement est-ce l’insoutenable légèreté de l’être mortel ou l’indécise force de l’être vivant par-delà les dangers ordinaires qu’il courre à chaque respiration ou encore l’étrangeté de la persévérance de cette machine à laver qui en voit pourtant des tissus et des poudres à longueur de tambours/
décidemment je n’aime pas les blondes semi en longueur ; elles me rappellent marine/
cela commence par un clic d’ordinateur ordinaire risquant à jamais l’arrêt subit du disque dur sans tête ni tête-à-queue/