Je
promène ma vie dans des livres aimés, un labyrinthe de mots écrits par d'autres
et qui clignotent à chaque carrefour pour m'indiquer une direction, qui si elle
n'est pas la bonne, n'en sera pour autant pas maléfique. La mise en abyme de
l'image est un oeil vorace qui m'aspire mais me nourrit au lieu de me manger.
Un méli-mélo de surprises et de reconstitutions et je me laisse aspirer à plus
de profondeur, quitte à étouffer, suffoquer même. C'est à mon tout d'écrire mes
chroniques sur pilotis.
Dois-je
freiner ? dois-je accélérer ? Dois-je m'envelopper de nostalgies ou émerger de
ces ouates mortifèrement bleues ? Dois-je les dissoudre ? Comment assembler ces
azulejos pour en faire une fresque intime à mettre entre toutes les mains ? les
empiler façon château de cartes quitte à les voir se briser en d'autres figures
qui me ressembleraient aussi ? Ainsi s'écrit un livre à petits carreaux, de
ceux qu'on lit le dimanche quand on n'a plus le goût à rien.
A
Lisbonne les tramways jaunes brinqueballent, je laisse les gondoles à Venise et
je prends le premier vaporetto venu, tant de bateaux et si peu de rivages où
jeter l'encre, tout me donne le mal de mère.
V2 du 9
Lobo Antunes
azulejos
bain de cotons
bleus
pilotis Venise Solange
Le bleu
indispensable
Transpercé par les
lances de l'enfance
dont il faut à
jamais soigner les bleus
charrier des
déchets de souvenirs
dans les
circulations de sang
Du bleu
Plein les yeux
le son cristallin
du Qânun
se mêle aux
gravillons de sable
la mer, son va et
vient
installe le calme
tandis qu'en
silhouette le rocher à tête de Befana
défie la rage de
vent
ce soir j'intègre
les massacres et les bains de sang
dans la paix du
moment crépuscule flamboyant
impuissante
je baigne enveloppée
dans la foule attentive
comme dans du
coton
les regards
convergent vers le blanc de la robe et le bleu de la mer
inoubliable
je prends ce qui
m'est offert
mon dos calé
contre une pierre
plus debout
qu'assise
prête à jaillir
prêt à avaler la
musique
le feu du ciel
conquistador de bleus
la langueur des
vagues léchant le sable
plus tard la robe
blanche s'avance dans la mer
la femme
musicienne se retourne et sourit
étonnée de son acte
joyeux, irrépressible,
elle marche et ne
se dissout pas
l'instant reprend
sa place
dans le puzzle du
temps
l'enfance au
magasin des nostalgies
sur pilotis
le bateau est à
quai
il faut rejoindre
l'autre rive
dans le brouhaha
de diesel et de langues toutes étrangères
disparaître dans les
reflets de la lumière du phare qui dansent sur le bleu devenu noir.
octobre 2025



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