mercredi 16 décembre 2009

Paysage fer (2)

"Ailleurs, cette découpe sur une colline de dix arbres dans l'hiver, comme peints à l'encre de Chine et se détachant du ciel uniformément gris dans ce qu'on se souvient, et maintenant, à l'instant même, si on lève le regard à travers la fenêtre du train c'est soudain des échancrures violentes dans les nuages et des accumulations presque noires sur l'horizon qu'ici on domine, sur seulement l'étendue moutonnée de champs immensément labourés et personne.
Ne pas relire, accumuler seulement ces notations d'instants, puisque le même train, de jeudi à jeudi, en permettra la répétition, que ne changeront, mais lentement, que le cycle perceptible des saisons et la lumière.
[...] Décider cette fois en amont du voyage ce qu'il y aura à regarder et s'y tenir. Avoir préparé sur la carte Michelin 241 vendue 30F gare de l'Est les marques au stylo de ce qui s'ordonne sur le mince et serpentant liseré noir de la ligne de chemin de fer, et savoir gérer l'attente, la posture, savoir comment l'image va se mettre en place et ce qu'il faudra alors y saisir, même si ici on en rend compte dans un ordre qui n'est pas celui des marques sur la carte, mais celui de la reprise des notes sur le bloc jaune à papier quadrillé qui a servi, sur les genoux, aux mots repères, voire à quelques croquis de disposition de masses. S'être d'ailleurs répété plusieurs fois dans la semaine, non pas à voix haute mais quand seul on pense au texte qui s'élabore, alors même qu'on n'y travaille pas, puisqu'on n'est pas dans le train : ce qui compte,  c'est la disposition de masses. Ou bien : ce qui impressionne, dans l'encadrement de la vitre du compartiment, c'est la disposition de masses."

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