vendredi 13 décembre 2013

"Nous avons dû prendre l'univers en main mon frère et moi car un matin peu avant l'aube papa rendit l'âme sans crier gare"

Cette gare dont personne ne revient jamais pour en donner le nom
Cette âme qu’il s’était approprié comme une armure, comme on s’en va au camp de la mort.
Rendue comme on vomit
Ce père si énigmatique, si tant est que l’on connût le mot, si souvent absent, même lorsqu’il était avec nous, et qui tenait encore plus de place mort que vivant, étendu sur le plancher en costume de rien, et que la figeance glacée nous empêcherait de revêtir.
Cette aube si semblable aux précédentes, si tant est que j’en avais des souvenirs
Ce matin où nous dûmes échanger nos vies d’enfants contre des errances de vagabonds
Ce moi qui pensais être un autre et qui en était son ombre
Ce frère si peu fraternel
Cette main si fragile, si blanche, si fine, cette main qui ne pouvait contenir un monde si froid
Cet univers si lâche et si plein de trous, si peu consistant qu’il se voyait à peine, matérialisé par quelques tranches de pain tartinées de beurre rance, par quelques incartades du côté des marécages, par quelques assoupissements sur des couchettes dures à la literie en lambeaux.

un peu avant – sans crier – nous avons dû – un peu avant sans crier, nous avons dû – nous avons un peu nous avons peu crié nous avons dû crier un peu avant - nous avons mon et peu nous avons rendu l’univers, nous avons pris l’âme, nous avons pris la main de mon frère, nous avons crié gare, nous avons pris l’âme de papa, nous avons un matin dû prendre l’aube, rendre la gare, nous

1 commentaire:

Ange-gabrielle a dit…

Quel bonheur de retrouver ta plume, balbutiante, bouleversante, étonnante, toi quoi !