samedi 18 mars 2017

JE LUI AVAIS BIEN DIT...

Je lui avais bien dit que le pot- au- feu n'était pas assez cuit. mais sous prétexte que c'est Monsieur Je-Sais-Tout il m'assommait du contraire. Je suis patiente. J'écoute. Il argumente. Les poireaux vont se déliter? Ils sont durs comme tout gelés par l'hiver. Les carottes s'écrasent sous la langue? Elles craquent sous les dents menaçant les plus vulnérables.Quant aux navets et aux pommes de terre, ni cuits, ni "al dente", mais des blocs de béton.
Je lui fais remarquer le grotesque de la situation: que nenni! Je dois réapprendre le guide des modes de cuisson, je m'entends dire. J'enrage!
Et la viande? Venons-y. Moelleuse? Fondante m'ajoute-t-on.
Mais pour qui me prend-on? Une novice? Un palet inapte aux goûts et aux saveurs? Une bouche incapable d'apprécier la dureté ou la souplesse d'un aliment?
Les mains dans mes anses, je massacre les rebords de mon tablier. Une accalmie? Après tout, je m'en fiche, je laisserai aux autres l'infâme pot- au- feu et me régalerai de quelques œufs en meurette.
J'accepte ma défaite, la mine un peu déconfite heureuse que le bœuf donne du foin à retordre aux convives.
Je tousse. Un verre d'eau vite fait. Je tousse encore et encore. On me tape le dos. On me pend par les pieds. Je tousse toujours. Rien à faire. On appelle un ami médecin.
Je reste frémissante presque inerte maintenant. La malheureuse bouchée que j'avais avalée a fait une fausse route. Le médecin, lui, remplit l'acte de décès et me ferme les yeux. Rideau!
Et la cocotte-minute de soupirer!

1 commentaire:

MarieBipe REDON a dit…

heureusement que c'était un ami médecin ! ça aurait pu être un méchant qui aurait laissé ouverts les yeux de JE ! trop bien !