- La photo sur laquelle on voit Solange ne sent rien mais le souvenir de tous les parfums de la boutique qui n'existe plus me prend à la gorge, me fait mal à la tête (oui les souvenirs aussi peuvent faire mal à la tête). Une autre femme nous regarde et nous invite à la humer avec son parfum Dolce Vita qui nous fera succomber. Dans l'Amour au temps du Choléra, les parfums servaient de médicaments ; de médic'Amant ? L'amant offre à sa maîtresse, et pourquoi pas à son amante religieuse ? Celle qu'il aime et le fait mourir d'amour, de l'eau de Cologne Farina. J'ai longtemps cherché cette eau de Cologne, moi dans la vésicule ne supporte plus les parfums chimiques, je pensais que celle-ci, en souvenir d'une autre, Extra-vieille, ne me provoquerait pas d'allergie. Il y a peu, par hasard comme toujours, comme les livres dans les boîtes à livres, qui arrivent à point nommé, je suis tombée dessus et l'ai achetée. Comprar en espagnol. Je l'ai comprise, mais elle ne sent pas comme dans le livre de Garcia Marquez. Peut-être ont-ils copié l'authentique mais ont supprimé la substance chimique, qu'ils extrayaient de la Dame de Malacca et pouvait s'avérer dangereuse, ou trop bien soigner. Gift, cadeau et poison à la fois. Le souvenir des parfums nous enchaîne à un moment précis de notre vie, odeur de métal, parfum d'un être aimé, odeur de mer, odeur de vase et de diesel, de bananes pourries et de citrons, dans les méandres de l'Amazone. Les souvenirs ne rouillent jamais.
mercredi 11 décembre 2024
Images Odeurs
mardi 10 décembre 2024
CHERCHER - VOIR
VOIR - CHERCHER où TROUVER.
La branche-ramure enseigne les oiseaux flottant dans le ciel de fumée.Noir leur vol au cou des cheminées.
Noires leurs ailes veinées de sang.
Leurs corps concupiscents des crimes perpétrés
Brins d’herbes salis des chairs enchevêtrées
Tapis où s’enfoncent leurs pattes lourdes d’avoir trop tué
Et la forêt fétide
Purulente des âmes en lambeaux se balance
Couleurs et Ombres
Aux feux des corps décomposés
Arbres en rectitude
D’une terre vers le ciel improbable
Verticale de la douleur
Traversée de la laideur du monde
Mais pouvoir s’échapper
Pouvoir poser son corps
Devenir cendre
Sur un tapis cardé aux couleurs florilège
Urnes funéraires en pointillés de cœurs
samedi 7 décembre 2024
Balbutiement d'une pensée (3)
Un monde circulaire, assez statique où les choses changent lentement et reviennent avec une certaine circularité, régularité. Monde harmonieux, naturel.
Voilà ce que m’évoquent ces fleurs séchées sur couronne d’osier. Une vie où l’homme est encore très près de la nature, plante, récolte, fait sécher puis fabrique de ses mains la plupart des objets qu’il utilise. Lieu de vie et lieu de travail, temps de vie et temps professionnel se chevauchent voire se confondent. Je fabrique mes paniers de l’osier que j’ai récolté puis trempé dans l’eau avant de le tresser, assis près du feu dans ma cuisine, l’hiver quand aucun autres travaux extérieurs n’est possible. Je me chauffe avec le bois que j’ai coupé, tronçonné, transporté, et me nourris de ce que j’ai semé, du lait et de fromages que j’ai transformés. C’est mon voisin qui fabrique lui-même les pâtes et baratte le beurre. Mon cousin, lui, modèle l’argile des marmites, assiettes dans lesquels je mange et je chante sous l’effet du petit vin que nous donnent les vignes.
🌏
Quel contraste avec cette rue-tunnel, où l’homme n’a plus du tout de contact avec la nature, les arbres, le ciel, la terre ; où il foule le béton, ne voit plus les saisons se profiler, mais y est subitement plongé, cerné de toutes parts de murs verticaux qui l’étouffent, le font paraître minuscule et tellement insignifiant. Monde totalement artificialisé où circulent des hommes tous identiques, entourés de machines, voitures, vitres, béton. L’être humain a t-il développé une maladie auto-immune, est-il devenu son propre ennemi ? Pour s’échapper, il leur faudrait grimper le long de ces hautes murailles sans aspérités. Je les imagine suffoquant à la recherche d’un peu d’air, d’un peu de fraîcheur, d’un peu de silence aussi ; mais où se cacher ? Tout y est lisse, fonctionnel. Où est le cercle, la courbe , la couleur , la niche ? Un brin d’herbe, au secours je cherche un seul brin d’herbe qui aurait échappé au béton, ne vois qu’arbres en pots, mutilés, alignés, au garde à vous le long de trottoirs rectilignes. Je ne vois nulle trace de vie, de bonheur. Nos coeurs vont-ils devenir aussi secs que ce béton ?
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De
l’espace, de la verdure, des enfants, tout un groupe d’enfants
dans une vaste étendue regardant le ciel et souriant à la vie, la
saluant. L’espoir, l’air respiré à plein poumons, les bras
grands ouverts près à accueillir tout ce qui se présente, les
couleurs explosent comme un arc en ciel, seul l’adulte à droite,
statique, ne participe pas à la liesse, immobile, spectateur passif.
Ils saluent le ciel, ils crient leur joie d’être ensemble, d’être
vivants, de n’être pas enfermés, libres de pouvoir courir. De
très jeunes enfants semblant nous interpeler « Vous avez vu,
on est là, on exulte, on jubile, la vie est en nous, bouillonnante.
Laissez-nous agir, rêver, avoir des utopies. On n’en veut pas de
votre vieux monde, laisser nous arpenter l’espace, ouvrir des
brèches, nous seuls avons le pouvoir de sauver le vivant » Ils sont
aussi beaux et fragiles que notre planète, ils sont la seule
aventure qui nous reste.
jeudi 5 décembre 2024
L'œil et la source / 3
pour l'heure tout est calme
Atlas, le titan, soutient le monde sur ses épaules, corps ployant sous le fardeau
l'insupportable est porté et la souffrance est tue
de l'inachevé du marbre on ne sait que la torsion et la tension
Atlas: géant que la mythologie disait porter le ciel. On a ainsi appelé le recueil des cartes géographiques à cause de la grandeur du format. La vertèbre se nomme ainsi parce qu'elle supporte la tête, comme Atlas le ciel.
de mon atlas d'images des rhizomes s'ébauchent, des sentes se dessinent, des chaînes se libèrent
d'une cartographie de mondes intérieurs, des failles comme des craintes se cristallisent et
ciseaux et burins vont s'acharner pour créer ce qui doit l'être et dont on ne sait rien encore
des formes naîtront du geste
des images se tiennent à l'affût, un peu dans l'ombre, un peu froissées, portant en elles tout un poids de ténèbres
elles se doivent de rendre figure, de faire mémoire
entre
elles des chapelets de pensées abandonnées sur le bas-côté,
négligées, sacrifiées sur l'autel du temps qui passe
mais on sait aussi les leurres de l'image auxquels se nouent les leurres de la langue
figures sans mesures mais pas sans semence
quel réel se profile dans la transparence des visages ?
quel passage à mettre au jour ou quel esprit à délivrer des peaux qui recouvrent nos corps ?
quel invisible à rendre visible ?
ce qui naîtra ne sera sans doute rien d'autre que l'ombre de pensées bien enroulées sur elles-mêmes,
bien serrées et ficelées dans le livre de la vie
qui ne s'ouvrirait peut-être que dans l'obscurité d'un confessionnal
serait-ce prendre un risque que de briser les chaînes des migrances mentales
et laisser jaillir ce qui cherche à éclore et déjouer les peurs
on tient encore le livre à peine ouvert, on laisse juste quelques pages
se détacher du tronc
dans chaque petit bout de vie racornie
une fêlure à l'intérieur, un accroc, une lutte pour libérer l'esprit de la matière
alors s'emparer de ces recoins de soi et s'acheminer dans ce labyrinthe
(la photo 1 a été prise lors d'une exposition d'Evelyne Galinski et Jean-Claude Borowiak à Champetières 63)
la photo 2 a été prise au musée d'art moderne et contemporaine de Saint-Etienne: c'est un détail d'une oeuvre de Lena Vandrey " le Confessionnal"
la photo 3 est celle d'un esclave de Michel-Ange appelée Atlas exposée au musée de Florence )