samedi 16 octobre 2010

en attendant le facteur









l’écrivain venue du valais suisse -j’entends des accents de mon enfance- nous propose à nous dix assis en grand cercle dans la pièce pleine de couleurs, rouge rose orange peluche violette, sous le regard bienveillant du daim blanc, d’écrire une histoire -aucune imagination pour la fiction j’aime écrire le réel- un récit d’une phrase sans point ni coupe une seule traite -ma passion pour la ponctuation ne connaît pas le point final- qui démarrerait sur le nom d’un personnage-métier donné par notre voisin de droite -j’hérite du facteur- se terminerait en une chute à prévoir au départ histoire de trajectoire de savoir où aller -pas capable d’envisager la chute- avec l’idée de se laisser entraîner dans un vif courant d’écriture avancer vite courir sauter enchaîner les actions gommer les sensations -«écriture automatique» dit-elle- j’essaie de lancer ma plume comme un javelot -l’écrivain semble surprise que nous n’utilisions pas nos ordinateurs en atelier- je gratte le papier d’un carnet rouge -son plus sensuel que celui des doigts heurtant les touches d’un clavier mais moins rapide quoique- mon stylo-plume trace des courbes de lettres mots phrases -comment raconter une histoire quand le réel me paraît plus intéressant surprenant émouvant drôle que nos projections imaginaires- toujours pas de chute à l’horizon, juste un facteur qui, triste de ne plus distribuer de lettres rien que des factures, compose des missives amoureuses qu’il sème à tous vents dans des boites croisées sur sa route, les boites ornées de prénoms de femmes avec beaucoup de i, il aime les i -amorce prometteuse, facteur à la tati, de la poésie, dit-on- pourtant, coup de frein, ralentissement, point d’interrogation, questions, le flux de l’intrigue à peine esquissée s’arrête : qu’arrivera-t-il à ce petit facteur épris de mots d’amour, quelle suite suffisamment belle, pas de fin ? et la sonnerie retentit deux fois.



1 commentaire:

Lìn a dit…

j'aime beaucoup cette mise en perspective de l'histoire fictive du facteur et de l'histoire réelle de l'atelier, tout y est, même les deux sonneries du fact... euh... du téléphone !