mardi 25 février 2020

Figurer le monde

À l’heure où les cartes deviennent plus que jamais objets de consommation quasi quotidiens, à celle où le pouvoir accru de la cartographie paraît sans limite et où, par la puissance et la vitesse combinées des algorithmes, les artifices et les conventions qui l’ont rendue possible s’estompent de plus en plus et sont toujours plus difficiles à discerner, l’ambivalence de la cartographie doit être plus que jamais soulignée. Nous savions que la carte était une représentation, donc « un langage »  avec sa grammaire propre et, qu’à ce titre, elle pouvait dire ce qu’elle voulait et même mentir à dessein. Nous comprenons d’autant mieux aujourd’hui qu’il s’agit d’abord d’un pharmakon  : à la fois remède et poison, la carte peut en effet figurer comme défigurer le monde, nous mettre en relation comme faire écran. Or il ne tient qu’à nous de se saisir de la carte, de refuser l’artifice et de retrouver l’outil.

Alexandre Chollier et Federico Ferretti 
Dans "Ecrits cartographiques": Elisée Reclus


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