G,
arrivée de votre lettre tout à l’heure, et me voici célibataire, (du genre actif ou passif je ne le sais pas encore, comme j’entre dans cet état qui m’est si peu familier ...) ; libérée d’un lien qu’hier encore j’imaginais indestructible, tandis que se diffusait de vous à moi ce sentiment «d’intranquillité» dont vous parlez ; notre histoire, plus encore que ma carrière d’artiste, me semblait essentielle autant qu’elle m’inquiétait ;
une évolution de notre relation, vous côtoyer avec les «autres» ou «une autre», je ne le souhaite pas ; l’instant est au désir du silence-absence, me re-créer, reconstituer le vide de vous autour de moi ; nécessité donc, d’ignorer où vous êtes et ce que vous faites ;
de mariage entre nous, il n’en était pas question tant j’essaie d’esquiver ces liens en formes de cordes ou d’anneaux, témoins publics de nos attachements ; alors, comment conjuguer sentiment amoureux et liberté ? comment corriger ces errances qui me dispersent à tous vents sans me sentir prisonnière dans la cage dorée de l’amour voluptueux ? ces derniers temps, peut-être, quelque chose au fond de moi rêvait une forme d’engagement ;
cela n’aurait rien changé à l’affaire car vous êtes homme à préférer toujours l’ailleurs, l’inconnu, le nouveau, «l’autre», cette sève jeune et fraiche, dans laquelle vous puisez inlassablement votre énergie créatrice ;
votre anatomie me manque déjà, mais je sais pouvoir rencontrer encore un corps qui m’inspire autant ;
qui me manquera le plus ...? est-ce votre corps ? est-ce vous ? ou l’idée que je me faisais de nous ? en attendant, je vais m’employer à «prendre soin de moi» pour me distraire de vous, oublier vos mains sur ma peau, vos lèvres, votre...
dès l’origine il y eu entre nous l’évidence de l’amour, du corps contre corps ;
«c’est fini !» me dites-vous et je vous réponds que je suis d’accord pour le mot FIN, pour que l’histoire se termine sans histoire.
S.
avec :
les mots que je donne à ma voisine ange-gabrielle,
ceux que je reçois de mon voisin grandpierre,
les 3 mots en C de mars de béatrice.