lundi 13 janvier 2020

atelier 2018-2019, Cartographie 21/méditation

Le chemin s’ouvre au-delà de la terre froide, refusant ces parcelles d’un seul tenant. Cette non localité diffracte à l’infini des bruits à rebours, discordants, désarticulés.
Le chemin devient sentier, puis sente qui effleure la masure, gravité ruinée, impuissante. Sur le crépi morcelé de l’ancien café perdu au milieu de nulle part, les lettres violettes pleurent en profondeur sous les fenêtres. Se balance au loquet rouillé un carton incongru mentionnant « fermé jusqu’à nouvel ordre ». Ordre de qui ? De quelles divisions fractionnaires ? Une perte habitée à grands frais. Renvoi à l’absence désordonnée, sidérante, la burle sibère sur la berge. Les congères appellent au loin les barres de mers et se lovent dans leur confinement poétique. Congères au grain tassé, si compact localement. Mais les franchissent inlassablement des pistes menées de biais, révélant des écroulements a minima.
Le chemin préfère l’écartèlement outre les surfaces et au-delà des carcasses, les débris de mots, au creux dans la poitrine.

La terre froide, morcelée, mais bornée par l’arbre du temps, repère rassurant, incompressible de toute éternité.

dimanche 12 janvier 2020

Atlas de l'anthropocène

Pour bien commencer l'année, ne quittons pas le thème de la cartographie avec cet "Atlas de l'anthropocène" où dans sa postface, Bruno Latour écrit :
« Atlas, dans la mythologie, représente un géant capable de tenir la Terre sur ses épaules sans en être écrasé. Mais quand Gérard Mercator publie en 1538 ce qu'il décide d'appeler un Atlas, le rapport des forces s’est complètement inversé : un "Atlas" est un ensemble de planches, imprimées sur du papier, quelque chose que l’on feuillette et que le cartographe tient dans sa main ; ce n’est plus la Terre que l’on a sur le dos et qui nous écrase, mais la Terre que l’on domine, que l’on possède et que l’on maîtrise totalement. Près de cinq siècles après, voilà que la situation s’inverse à nouveau : paraît un "Atlas" qui permet aux lecteurs de comprendre pourquoi il est tout à fait vain de prétendre dominer, maîtriser, posséder la Terre, et que le seul résultat de cette idée folle, c’est de risquer de se trouver écrasé par Celle que personne ne peut porter sur ses épaules. » Bruno Latour

Changement climatique, érosion de la biodiversité, évolution démographique, urbanisation, pollution atmosphérique, détérioration des sols, catastrophes naturelles, accidents industriels, crises sanitaires, mobilisations sociales, sommets internationaux… Voici le premier atlas réunissant l’ensemble des données sur la crise écologique de notre temps.

Atlas de l'Anthropocène

Préface de Jan Zalasiewicz
Postface de Bruno Latour
Presses de Sciences Po | Hors collection

J'adore cette image qui nous montre les rapports de forces qui s'inversent. Lors d'un entretien,  

François Gémenne déclare : "Nous sommes à un moment charnière, qui suscite des tensions puissantes, des regains de nationalisme et de climatosepticisme. Mais les grandes transformations sont toujours précédées d'un baroud d'honneur de l'ancien monde. J'ose espérer que c'est ce que nous vivons aujourd'hui, que les Bolsonaro, Trump, Orbàn sont les dernières caricatures, les derniers clowns d'un modèle arrivé à son terme."
Moi aussi !