dimanche 19 février 2023

à la dérive

à la dérive

dans un monde sourd et sombre

tenter de crever le magma de boursouflures

où décantent la mixture du quotidien

et la purulence du corps dissous du jour

se déposent alors ébahis des débris de mots

cherchant à faire ressortir quelques rais

d’une lumière vive ou délavée

dessinant des lignes droites ou

des arabesques au travers de l’impossible

 

Klasma écrit en écho aux deux derniers paragraphes de l'interlude 3 des Vagues de Virginia Woolf dont voici ma traduction:

Jetant maintenant un coup d’œil d’un côté, de l’autre, ils regardaient plus intensément , sous les fleurs, vers les avenues sombres d’un monde non éclairé où les feuilles pourrissent et les fleurs sont tombées. Et l’un d’eux, s’élançant à merveille comme une flèche, se posant avec exactitude, embrochait le corps flasque, monstrueux d’un ver sans défense, le piquant à plusieurs reprises, et le laissant se putréfier . Là-bas au milieu des racines où les fleurs pourrissaient, des bouffées de puanteur cadavérique s’exhalaient ; des gouttes se formaient sur les flancs bouffis des choses gonflées. La peau des fruits pourris se déchirait, et de la matière suintait trop épaisse pour couler. Des excrétions jaunes exsudaient des limaces, et de temps en temps un corps informe avec une tête à chaque extrémité oscillait lentement d’un côté à l’autre. Les oiseaux aux yeux d’or en s’élançant entre les feuilles observaient cette purulence, cette humidité, d’un air perplexe. De temps à autre ils plongeaient la pointe de leurs becs sauvagement dans cette mixture poisseuse.

À présent, le soleil levant entrant par la fenêtre, atteignant le liseré rouge du rideau, commença à faire ressortir des cercles et des lignes. Là dans la lumière croissante la blancheur s’étendait sur les assiettes ; l’étincellement se condensait sur la lame du couteau. Fauteuils et placards se dessinaient derrière et bien qu’ils soient séparés ils semblaient inextricablement emmêlés. Le miroir blanchissait le mur d’une flaque La fleur naturelle sur le rebord de la fenêtre était accompagnée d’un fantôme de fleur. Pourtant le fantôme faisait partie de la fleur, car lorsqu’un bourgeon se libéra la pâle fleur dans la glace ouvrit aussi un bourgeon.

Le vent se leva. Les vagues tambourinaient sur le rivage, comme des guerriers enturbannés, comme des hommes enturbannés qui levant leurs sagaies empoisonnées les faisaient tournoyer au-dessus d’eux, avançaient sur le troupeau en train de paître, les moutons blancs.




 

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