dimanche 7 février 2010

lettre à Joséphine

Joséphine,

Sais-tu que j'ai souvent pensé à toi en me revoyant dans la pénombre de cette chapelle ...
Enfant de douze ans, obligée d'aller tous les matins à l'office à la lueur des cierges, j'observais les cornettes des religieuses qui décrivaient des ombres chinoises sur les murs laiteux de la chapelle, l'officiant montait, descendait de l'estrade, récitait des prières que je n'écoutais pas mais auxquelles le répondais sans me tromper. Je baissais la tête, la relevais au moment opportun, j'allais même communier au moment voulu, je n'avais pas froid, pas chaud, pas faim (je n'avais pas déjeuné), j'étais ailleurs. L'ailleurs pouvait être un filet de lumière qui filtrait à travers les planches disjointes du plancher, un point de couleur sur le tapis de l'autel, une toile d'araignée qui avait été tissée entre les plis de la robe d'un saint, ou un bruit, une burette que l'enfant de choeur faisait s'entrechoquer et qui me donnait des idées de cascades de ruisseaux qui dévalaient des rocailles et qui venaient anéantir cet endroit trop parfait et froid.
Joséphine, me croiras-tu, dans cette prison, j'étais libre, je ne pouvais pas parler, mais pourtant j'ai tenu toutes les conversations du monde avec ses saints journaliers, ses martyrs aux noms bizarres, Sainte Blandine dans la fosse aux lions, Saint Irénée et les autres, je les ai tous connus, ora pro nobis je ne savais même pas ce que cela voulait dire mais pourtant je les ai répétés maintes fois,
Torpeur comme un canard qui sort de l'eau et s'ébroue, ite missa est avec tout le monde, les religieuses sortent les premières, leurs mains disparaissent dans leurs larges manches, les enfants viennent ensuite, moi je viens de passer un moment peuplé de mille tableaux de mille facettes et Dieu dans tout cela...
Joséphine laisse Dieu tranquille, moi j'étais en représentation, je ne ressentais rien j'étais actrice,
Quelle vie, me diras-tu. Mais si, tout peut se faire, il suffit d'être ailleurs, demain je reviendrai sur ce banc froid, et pendant trois quarts d'heure je vivrai autrement, tu sais regarde mes genoux ils portent la marque de la rainure du banc,
Au revoir, Joséphine, réponds-moi si tu en as le temps, moi je continue de t'écrire par la pensée, je suis maintenant couchée dans ce lit en 70, aux draps blancs, l'édredon me recouvre, je n'ai pas froid, je fais attention de bien laisser mes bras le long de mon corps car la religieuse en passant me rappellerait à l'ordre, même au lit il faut avoir une attitude digne. Sais-tu avant de dormir, on a dit une prière, je me souviens c'est à peu près cela :
"Dans mon lit je me couche, dans mon lit je me rends, je prends Dieu pour mon père, la Sainte Vierge pour ma mère, les anges pour mes frères,
Je pense que je n'ai oublié personne, bonne nuit petit Jésus"

Je t'embrasse Joséphine

Publié par Jeannine

1 commentaire:

Anonyme a dit…

JEANINE !!
Sept fois c'en est trop ! C'est le Bon Dieu qui te parles,Jeanine, enfin, et en divine colère !
Ayant, depuis quelques temps mis votre décablogue dans mes "favoris"(godgle aurait pu prévoir les "honnis" aussi)je consterne avec constatation, que non seulement tu n'as pas encore accompli ta mission consistant à convertir ces mécréant(e)s à nos écritures, mais qu'ils(elles) sont, bien au contraire, en train, consciencieusement,(en fait ont-ils gardé une véritable conscience ?)et sourd-noisement(en fait, qu'entendent-ils encore ?), de t'athéiser. Je suis atterré!
Ta lette à Joséphine est certes aujourd'hui beaucoup mieux écrite que ces billets doux, que tu m'adressais autrefois par la poste ailée de mes anges.Je viens de retrouver celui où tu me dis un jour, ne pas vouloir t'avouer cet amour d'enfant pour Josephine, de peur de mon ire et de mon divin courroux.cC'est vrai que mes séides serviteurs t'en auraient sûrement en péché, mais à quoi sert de mieux écrire si ce n'est pour me louer ? (d'ailleurs, j'envisage devant la baisse terrible de mon audieumat de renoncer à demander, pour pouvoir me louer, de fournir trois émois de caution).
Ne vous ai-je pourtant, tout récemment, prouvé toute ma céleste puissance d'amour en épargnant tant de vies dans la catastrophe d'Haïti ?
Tant d'ingratitudes et d'aveuglements me peinent.
Jeanine reprends toi !ite missivo mia est !
Dieu le fils