Ce
que l'on nomme chemin, trajet, itinéraire - c'est à dire là où
l'on lance le pas – n'est rien d'autre qu'un sillon creusé, à
intervalles réguliers, depuis tant de temps ; et , même si on
voulait en rester au premier regard, dans cette ville là, c'est
quelque chose d'impossible : comment retrouver le premier regard
pour la ville où l'on vit...
S'obstiner,
creuser, attendre. On finit par avoir le vertige de se trouver face à
la lumière vacillante au vent de la nuit, sans savoir ce que l'on
joue, au milieu de nulle part, et vouloir prouver juste qu'on a vécu,
quand le temps s'accélère et, avant que notre ombre qui n'est pas
électrique, disparaisse comme s'il s'agissait d'une lueur d'huile
provenant d'une lampe d'astrakan.
Alors on passe de rues en places, de fenêtre en
fenêtre, on regarde par la porte ouverte dans les cuisines où –
autrefois – on apercevait le foyer sur lequel des poêlons et des
grosses marmites mijotaient et où – aujourd'hui – ne
retentissent que les alarmes sèches de micro-ondes qui ne
réchauffent guère les souvenirs.
Reprendre
son souffle, écouter ce que l'on n'entend plus et qui pourtant longtemps
nous a bercés, jeter quelques tendres murmures sur la ville qui
doucement s'endort, se tenir au bord du précipice, l'émotion
greffée dans le regard, méditer sur le pourquoi de mourir en hiver
et puis, sans une hésitation – et le chemin ne serait-il pas
qu'une suite d'hésitations – , fuir les impasses et se planter à un carrefour avec une envie de
poursuivre : être debout sur la route dans le jour
commençant et fixer l'horizon.
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