samedi 28 juillet 2012

Balade botanique à l'Ouest Togo


Nous avons rendez-vous avec Prosper Nyanu (dit « Prosper-papillon »), célèbre entomologiste et botaniste à Kuma Konda – qui signifie « carrefour » en langue Ewé – Nous grimpons sut 10 kms le long d'une route en lacets et large couverture végétale, bordée d'amaryllis blancs, croisons des cascades et arrivons au village que nous visitons avec le fils de Prosper. Tout le village est décoré, portes et volets en bois peint par les habitants. Au centre du village, un immense arbre aux énormes racines veineuses apparentes offre son ombre à tous ceux qui veulent s'y reposer.


Tepe nous fait visiter son atelier de peinture végétale et nous conduit chez son père qui nous accompagne dans une balade botanique de plusieurs heures dans la brousse. Nous sommes à 7 kms du Ghana que l'on peut rejoindre clandestinement par les sentiers.
Il nous montre les yukkas géants, les irokos au bois très dur, les baobabs autour desquels s'enroulent les ficus étrangleurs, le moringa dont les feuilles se mangent, le flamboyant, le cailcédrat dont l'écorce est consommée comme fortifiant, les anacardiers tortueux qui donnent la noix de cajou , les neems dont on tire la quinine contre le paludisme, un immense « mitrogena stipulosa », arbre qui pousse près de l'eau, au tronc large et très haut et qui présente un creux où peut se loger un homme.

Partout de l'eau, des rivières transparentes, différentes fougères sur le sol, sur les troncs, grimpantes comme des lianes et celle étonnante dont le dessous est recouvert de spores blanches. Il l'applique sur son bras, la fougère y laisse un tatouage blanc parfait , des cacaoyers et leurs cabosses, des caféiers, kolatiers, rocouyers et une plante surprenante, le « mimosa pudica » qui replie instantanément ses feuilles dés qu'on la touche. En Ewé, elle se nomme « Redresse-toi, ton mari arrive ».
La canopée est épaisse, l'humidité forte, les sentiers détrempés. Nous croisons des caladiums bicolores, plantes aux grandes feuilles vertes parsemées de taches rouge vif et blanches, d'immenses oreilles d'éléphants. Nous entendons de tout côté d'innombrables vols et chants d'oiseaux que nous ne voyons pas, ils sont en général très petits et apercevons un kalao, oiseau assez gros, noir au bec coloré.
 
La partie la plus intéressante de la balade sera la recherche de plantes tinctoriales avec lesquelles Prosper peint.

La feuille de l'indigo écrasée et malaxée dans la main donne une belle teinte verte qui fonce au fil du temps quand on l'applique sur une feuille de papier. Si l'on veut obtenir du bleu, il faut laisser fermenter quelques semaines.
Les grandes feuilles de teck, par le même procédé donnent un brun terre de sienne que l'on obtient également avec la terre qui est rouge-brun.
Pour obtenir un riche violet, on utilise le kola, un orange vif en raclant l'intérieur de l'écorce de l'arangana (originaire de Madagascar),on peut y ajouter du jaune d'oeuf épaissi au kaolin ;le rouge vif vient de l'hibiscus bissap et le noir, d'une liane nommée moukouna. Prosper réalise sous mes yeux un dessin, cases, arbres ; je l'oublie sur la table après le repas, ainsi que mes stylos.
Pour réaliser ses peintures, il enduit une toile de kaolin mêlé à de la colle blanche. Je n'apprécie pas du tout ses toiles stylisées mais tombe amoureuse d'un masque noir fait d'une matière criblée de trous et très légère, avec deux trous pour les yeux. Je pense à une pierre volcanique mais sa légèreté me dissuade, à du bois ou du liège. Je n'y suis pas du tout. Prosper ramasse des fourmilières désertées et taille ses masques dans cette matière étonnante.
Nous nous régalons d'un poulet bicyclette, de riz et de ratatouille avant de le quitter et de redescendre sur Kpalimé pour visiter le Centre de Formation de l'Artisanat. Noue échangeons nos mails. Voici son site :
www.afreak.net/aubergepapillon.php
mais il ne possède ni bouquins ni fiches écrites sur ses connaissances et rêve pour cela de posséder un appareil-photo. Je lui promets de lui apporter le mien l'an prochain quand je m'en serai procuré un nouveau (une raison supplémentaire d'y retourner, comme s'il fallait s'en inventer).
Nous ne verrons aucune de ses planches de spécimens rares de papillons : tout est à Lomé en ce moment pour une exposition.



3 commentaires:

jieffebi a dit…

Bravo, on y est et on partage cette fringale de ta decouverte.Tes mots colores chantonnent sur nos retines.Tu nous dis une Afrique illustree comme un livre de contes de patrick Chamoiseau.Ta voix chante elle aussi comme si elle savourait de nous reveler une des recettes de ton bonheur.

Laura- Solange a dit…

J'adore ces mots pépites que tu sèmes tout au long du texte! J'en veux encore...

Ange-gabrielle a dit…

Je n'osais pas, de peur de monopoliser le blog, alors en voilà
Mais où êtes-vous donc tou(te)s ???