Le sol tapissé de lichens, du chevelu long ou court, des pelotes que l’on prend délicatement entre ses doigts pour ne pas les briser, dont on évalue la légèreté telle une boule de coton. Tignasses desséchées, presque minérales, dont le vocable lui-même est source de fascination. Ce sont ces feuilles d’hiver dont parle Thoreau. Mes yeux s’accrochent sur leur carcasse ailée.
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On dirait que la nature – enfin ce qui devant moi se déploie – est encore dans une sorte d’attente, presque prête mais pas tout à fait; on n’est que le premier mars, c’est encore l’hiver même si la douceur nous a fait ôter les lainages. Mais ici, rien n’ose encore se laisser éclater. Soudain, en bordure de pré , une fleur jaune que l’on nomme coucou. Isolée Et, même si la fleur est sans regard et sans voix ( comme l’écrit Jaccottet) l’on pourrait paraphraser pour elle les mots d’Antigone : j’ai cru au printemps la première aujourd’hui.
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Une trouée dans cette forêt souvent traversée. Une large trouée qui défigure le paysage connu et aimé. La sensation de site protégé, abrité est fragilisée. En une journée un engin de coupe a transformé ce lieu, laissant penser que l’épaisseur de la forêt n’est rien d’autre qu’une illusion. Un passage: non. Une brèche, bien plus profonde, à laquelle le regard devra s’habituer.
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