Lumière dedans posée sur son buvard de
brume
caché dans le tableau sur le mur du
docteur
fantôme de mon frère au fond du paysage
un dimanche d'enfance à la doublure
grise
l'image qui flamboie dans le soleil
d'hiver
dans la rue tout au
fond à l'orée des malaises
son corps est une
terre, son sang bout en douceur.
il piétine la neige en
criant de bonheur
le portillon de bois
entrouvert de guingois
laisse passer le flot
de lumière encadré
aucun pas dans la
neige la marque n'est pas là
la pie qui se repose,
trois heures quatorze fois
seul élément vibrant
dans ce décor de soie
la pie qui se demande où
trouver quelques graines
des micro-mammifères,
des insectes sournois
mon œil mal interprète
midi à quatorze heures
brouillard bien à
l'abri
composition parfaite
quelques toits,
quelques troncs,
maisons endimanchées de lumières violettes
après-midi qui sait comment le crépuscule
quand on n'a pas le
coeur à faire du soleil
et qu'on voit une pie faire
beau dans le décor
et qu'on voudrait que
loin de ce badigeon tendre,
comme certains oiseaux
se cacher pour mourir
ce qu'il y a dans les
yeux de celle qui regarde
un souvenir captif,
une mise en abyme
Un fantôme sans
chaînes
des arbres
ensommeillés
nous n'atteindrons
jamais cette fonte des neiges
et ces brouillards
givrants au dessus de nos yeux
nous resterons tapis à
regarder la pie
attendre que l'enfance
fonde en métamorphoses
et qu'on glisse dessus
comme un verglas sanglant
que la lumière inonde
éclabousse éblouisse
que finisse l'angoisse,
que commence la joie !
5 commentaires:
Très beau texte et tu sais la joie, elle est là ; là, Marie-Pierre, comme dans cette phrase à propos de C Bailly : « C’est une grande et violente chasse aux fantômes qu’engage Bailly à chaque phrase, à chaque instant pour tenter de se saisir non pas ce qui échappe mais ce qui est là, terriblement là mais dont seuls les yeux spectraux perçoivent l’écoulement». Ce que nous pensons devoir aller chercher dans un lieu ou une pratique, se trouve en fait là où nous sommes déjà. Il est caché à la vue de tous.
En lisant le texte envoyé par Solange, j'ai été subjuguée car c'était exactement cela que je ressentais. Et aussi, les fantômes sans chaînes (s'enchaînent) c'est nous qui les leur mettons. c'est aussi ce que je veux dire à la fin, le fait de regarder un tableau, de l'image aux yeux puis au cerveau, puis le tableau que l'on perce comme on ouvrirait une fenêtre. Bien sûr que la joie est au fond de nous, je ne l'invoque pas comme une incantation, c'est l'écriture (une pratique aussi) qui la fait affleurer, tant il est vrai que l'écriture sur les tableaux grâce à S. et ensemble, m'en procure.
Très beau texte. Tout est dit dans les commentaires précédents.
J'aime beaucoup" un dimanche d'enfance à la doublure grise " "attendre que l'enfance fonde en métamorphoses"... Et je ne me souviens plus dans quel texte tu as déjà évoqué ce tableau...
ah ces jeux de mots et de sons, de lectures croisées possibles si on joue à changer l'orthographe durant la lecture. J'adore
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