Sur les berges d’une rivière, il
est coutumier de laisser vagabonder son esprit. Ils sont nombreux les
êtres de toutes sortes qui se sont posés sur l’herbe ou sur les
pierres du bord de l’eau, ont laissé leurs pensées glisser sur le
courant en triturant quelque galet entre leurs doigts. Tous ces
hommes, toutes ces femmes prenant un temps d’arrêt dans leur vie,
déposant leur regard sur la surface de l’onde, en tête à tête
avec les absences qui les ont façonnés, tentant de se franchir
eux-mêmes, surplombés de la mémoire des ruines.
Ce jour là, vers la fin de l’été,
l’homme, après avoir posé son vélo contre un arbre a érigé
rapidement une tente qu’il a plantée, pas trop près de la
rivière, par prudence, et un peu à l’abri de l’ énorme paroi
rocheuse pour ne pas être visible de la route sinuant au-dessus de
la vallée. Ce site est protégé et il est interdit de faire du feu,
de camper, de pratiquer le moto-cross et d’autres actions qu’il
n’a pas mémorisées. Le ciel s’est assombri assez soudainement
mais il est trop fatigué pour s’en soucier après le parcours en
montagnes russes qu’il a traversées aujourd’hui.
Ce lieu lui
semble familier, comme s’il venait de franchir un passage entre
l’homme qu’il est aujourd’hui et l’enfant qu’il a été.
L’enfant n’est plus depuis longtemps mais son enfance coule
toujours dans ses veines. Elle est tout à la fois emplie de silence
et bruissante de mille petites voix. Il lui semble les reconnaître
dans le flux de la rivière. Qu’importe quel jour de quel an il se
trouve, il est dans cette atemporalité génératrice de songes.
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