mardi 12 décembre 2017

# 4; ma Dorette,

     C'est l'histoire d'une si petite rivière qui paresse et procrastine entre les herbes folles. Insoumise, elle se rit d'un tracé rectiligne et lui préfère les courbes élégantes, les coudes qui l'égratignent ou les boucles mutines. La Dorette puisqu'il en est ainsi naît quelque part près des sources ferrugineuses de La Souchère en amont de Saint Victor sur Arlanc avant que de s'enfoncer dans la forêt, ressurgir entre les pierres, miroiter au soleil de ses gouttelettes dorées et continuer son cours. Les renoncules qui l'accompagnent se penchent mollement pour boire le long de ses berges sauvages. Ici, c'est le royaume des libellules. Elles surfent sur ses eaux transparentes et leur ballet lui confère un air d'opéra habité par une foultitude d'insectes intermittents et éphémères qui mourront à la nuit tombée. Elle invite mon vague à l'âme, me possède par enchantement, s'offre à moi de son rire cristallin. Elle s'insinue, fiévreuse et entêtée, m'oblige à la courser et impudique je lui offre un orteil qui joue avec les phasmes ou bien les scarabées rutilants. Elle espère, elle attend aguicheuse, elle pétille puis fatiguée du spectacle et du rôle qu'elle a à assumer, elle s'endort bercée par le bruissement des marguerites. Allongée dans la lande fleurie, séparée d'elle par une haie d'aulnes et de quelques frênes je mesure la palette du peintre et aimerai immortaliser à la gouache les teintes feutrées piquées de teintes vives qui la courtisent. Puis elle s'enfonce dans une futaie si épaisse qu'il est bien difficile de la suivre sans frissonner de l'ombre et de la fraîcheur pénétrantes mais c'est pour réapparaitre une ou deux lieues plus loin encore  plus vivante et plus malicieuse. Et là, elle s'étire elle ondule dans son lit ouvert dans la vallée. Religieuse, elle s'incline devant Dore L'Eglise pour y être avalée comme dans une conte de mauvaise fée par sa grande sœur La Dore. Fin d'une mythologie sur douze kilomètres annoncée.

4 commentaires:

Ange-gabrielle a dit…

A toi ma Dorette,
C'est comme si je lisais ton histoire, la Dorette c'est toi, malicieuse, élégante, miroitante, surfante, cristalline, à l'orteil aguicheur de petite libellule. Même le langage est précieux comme cette Dorette-là. Je préfère que tu l'écrives plutôt que de la peindre, c'est trop beau.

Laura-Solange a dit…

Je pense que je vais aller la voir ta Dorette: elle me fait envie avec une telle description!

MarieBipe REDON a dit…

m'adorette adorée

Linette a dit…

Merci, merci les filles je ne peux que vous dire ça